Ancrer la sauvegarde de la biodiversité dans nos décisions d’investissement
L’érosion de la biodiversité : c’est l’autre facette de la crise écologique. Jusqu’à présent moins médiatisée que le réchauffement climatique, elle menace pourtant nos écosystèmes d’effondrement.
Par Gabrielle Delle Vigne, Directrice d’investissement, Azulis Capital
Rassemblant l’ensemble des êtres vivants, les écosystèmes dans lesquels ils vivent et les interactions des espèces avec leurs milieux, la biodiversité est essentielle à la vie sur Terre et des pans entiers de l’économie en dépendent. Or, son érosion fait partie des six limites planétaires[1] proches de leur point de bascule. Selon le rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), 75 % de l’environnement terrestre et 66 % de l’environnement marin sont déjà considérés comme « significativement altérés »[2]. Pour enrayer cette dynamique et restaurer les écosystèmes, il est nécessaire d’y allouer des investissements considérables. À cet égard, les acteurs économiques sont appelés à jouer un rôle moteur aux côtés des pouvoirs publics. En tant qu’acteur du capital-investissement, nous avons la responsabilité de nous mobiliser et d’allouer des ressources financières pour lutter contre cet enjeu majeur que constitue l’érosion de la biodiversité.
Chez Azulis Capital, nous agissons à travers différents leviers à notre portée, à commencer par la sensibilisation des PME que nous accompagnons. À l’image de l’importance accordée au climat dans les feuilles de route RSE des entreprises, nous souhaitons porter haut les enjeux de la biodiversité. Pour cela, nous avons renforcé la formation de nos équipes de gestion sur ces sujets et nous œuvrons pour mobiliser les entreprises de notre portefeuille. Nous les soutenons afin qu’elles puissent entamer une réflexion au sujet de trajectoires de réduction de l’impact négatif et de contribution positive à la préservation de la biodiversité, avec une focalisation particulière sur certains secteurs tels que l’agroalimentaire et les cosmétiques, par nature plus exposés à ces enjeux et pour lesquels les impacts sur la biodiversité sont les plus forts.
La biodiversité demeure toutefois un enjeu difficile à adresser car les impacts des entreprises sur les écosystèmes terrestres et aquatiques sont complexes à quantifier. Aussi, nous avons sponsorisé un programme de développement d’un outil de mesure de l’empreinte biodiversité, en partenariat avec CDC Biodiversité et la Phocéenne de Cosmétique, sur la base d’indicateurs communément admis. Cette méthodologie permet aux entreprises de comprendre quelle part de leur activité a le plus d’impact sur la biodiversité et ainsi de définir une trajectoire et des ambitions chiffrées. Nous souhaitons que cet outil rayonne et soit mis à profit par d’autres PME.
Azulis Capital intègre désormais pleinement la biodiversité dans ses engagements ESG et ses décisions d’investissement, en veillant à bâtir un équilibre entre les trois aspects de l’ESG : Environnement, Social et Gouvernance.
C’est notamment l’approche qui a guidé le projet « village solaire » au Maroc, mené par La Phocéenne de Cosmétique, en partenariat avec une enseigne de grande distribution et des représentants locaux. Protéger l’écosystème de l’arganier, mettre en place une filière durable, permettre aux femmes d’accéder à un travail pérenne, créer une école, soutenir le développement d’énergies renouvelables pour alimenter le village… Cette logique holistique a permis d’œuvrer en faveur de la sauvegarde de l’écosystème de l’argan, mais également de la préservation d’un patrimoine commun, et la consolidation de liens culturels et intergénérationnels. Un exemple de démarche que nous souhaitons valoriser, car nous sommes convaincus que la biodiversité, le climat et les enjeux sociaux doivent être pris en compte conjointement afin de pouvoir générer un impact global réellement positif.
[1] Limites définies par le Stockholm Resilience Centre – Url : https://www.stockholmresilience.org/
[2] Rapport de l’IPBES – https://www.ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr